jeudi 19 septembre 2013

Critique: Dévadé

En savourant Dévadé, lors de la première médiatique hier soir, une image m'est venue, une seule... quelle beauté !

Une beauté qui jaillit de personnages écorchés.  Écorchés par la vie et par les relations, parfois saines, souvent malsaines.  Mais des êtres d'une beauté magnifique dans leur façon de se battre.  Contre les malheurs de la vie.  De leur vie.  Mais aussi et surtout pour des rêves.  Rêves d'amour.  Rêves de bonheur.  Parce qu'il est là leur véritable combat.  Se battre pour un amour, un vrai.  Parce que s'ils baisent, s'ils boivent c'est pour oublier... ou pour trouver l'amour.  Le bonheur ou une parcelle de celui-ci.  Une vie. Simplement.

Je ne connais pas beaucoup, ou si peu, l'oeuvre de Ducharme.  J'ai bien acheté Dévadé, il y a des lunes.  Je ne me souviens pas si j'ai aimé.  Mais hier soir, j'ai aimé.  Aimé à la folie ces personnages, dignes malgré tout.  Qui cherche jour après jour le bonheur ou une certaine forme de celui-ci.  

Aimé, les mots de Ducharme.  Sa langue.  Son style. Ses tournures.  Sa parlure.  Ses images.  Peut-être encore plus ce qu'en ont fait Frédéric Dubois, le metteur en scène, et Marianne Marceau, l'adaptatrice.  Adaptatrice ?  Non.  Magicienne de l'adaptation.  Tout coule. Tout roucoule.  Ça frappe dans le mille.  Ça vient nous chercher.  Qui de Ducharme ou Marceau m'a le plus séduit ?  Je ne donnerai pas de nom mais dans mon coeur c'est elle la gagnante.

Aimé la mise en scène de Frédéric Dubois.  Il a su saisir l'essence même du texte.  Un environnement épuré.  Des personnages souvent en retrait mais toujours, ou presque, dans le champ de vision.  Comme des mots prêts à claquer.  À cingler.  À prendre leur envol dans le vent froid de l'hiver.  Un hiver bien présent d'ailleurs.  Avec cette neige qui tombe.  Lentement.  Constamment.  L'hiver est rude au Québec.  L'univers des personnages aussi.  Cette neige qui tombe est-ce la froidure de leur existence ?  Peut-être.  Sans doute.

Aimé la scénographie, l'environnement sonore, l'éclairage, les effets visuels.  Tout est là. À la fois discret et présent.  Un prélude musical.  Qui revient au moment du dénouement comme pour nous rappeler que le combat continue.  Que rien n'est encore gagné.  Que tout est à faire.  À recommencer.  Peu d'objets.  Un bain. Un téléphone des chaises. Droites ou roulante.  Que l'essentiel.  Que pour laisser toute la place aux mots.

Aimé le dénouement.  Cette touche de folie qui vient clore le spectacle.  Un moment joyeusement inusité que vous prendrez sûrement plaisir à découvrir.  Avec la musique du prélude qui revient.  Et puis, d'autres mots de Ducharme.

Aimé les performances des comédiens.  Cinq coeurs qui battent à l'unisson.  Cinq excellentes performances.  Deux qui ont touché mon coeur plus que les autres. Marianne Marceau et Sylvie Cantin.  Ça n'enlève rien aux autres.  Ils le savent.  Vous le saurez si vous y allez.

Le titre de ce billet est Critique: Dévadé, il devrait être Aimé: Dévadé parce que comme Jacques Leblanc, directeur artistique de la Bordée, j'ai le goût de dire: C'est trop beau !

Au Théâtre de la Bordée jusqu'au 12 octobre.  Avec Sylvie Cantin, Véronique Côté, Eliot Laprise, Hugues Frenette et Marianne Marceau.  Une mise en scène de Frédéric Dubois. Un texte de Réjean Ducharme.  Une adaptation de Marianne Marceau.

Bon théâtre et bonne danse !

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