vendredi 27 avril 2018

Amadeus: épique, majestueux.

Salieri et Mozart, deux êtres exceptionnels, deux destins tragiques. Un seul sera immortel. Et ce n'est peut-être pas celui qui croyait qu'il le serait au moment de sa mort qui le deviendra. Retour sur un spectacle épique, majestueux et humain.

Une critique de Robert Boisclair

Crédit photo: Stéphane Bourgeois
Synopsis
Wolfgang Amadeus Mozart, jeune talent montant et véritable génie musical, galvanise le tout Vienne avec sa musique remarquable. Antonio Salieri, compositeur établi, est dévoré par la jalousie. Sa folie vengeresse se double d'une réflexion sur le don de Dieu, le génie, la rivalité et l'immortalité. Réflexions que l'auteur Shaffer transpose dans un déliement des plus intéressants.

Crédit photo: Stéphane Bourgeois
Le spectacle débute par la confession de Salieri au seuil de la mort, qui affirme, se vante plutôt, d'être l'assassin de Mozart. Flash-backs sur la rencontre et la confrontation entre les deux hommes jusqu'à la mort de Mozart. Retour au point de départ de l'histoire.

Inspiré de personnages historiques, le spectacle de Shaffer s'en éloigne tout en s'en inspirant largement: les magnifiques opéras de Mozart, sa rencontre avec Constance, son épouse, sa présence à la cour de l'empereur Joseph II.

Requiem pour deux fous
  
Crédit photo: Stéphane Bourgeois
Amadeus impressionne. Jacques Leblanc également. Dans un rôle taillé sur mesure pour lui, il surpasse les attentes. Il est un sublime Salieri. Son talent éclate dans une production qu'il squatte de bout en bout. Son Salieri est perfide et calculateur. Un personnage complexe qui devient, à l'écoute des oeuvres de Mozart ou alors qu'il est envoûté par les charmes de Constance, un être tendre et vulnérable.

Jacques Leblanc offre quelques-unes des scènes les plus mémorables de cet Amadeus. Parmi celles-ci, la scène du cri de la médiocrité interprétée sur fond musical vaut à elle seule le déplacement. Sa performance ne pourrait pas être aussi grandiose sans l'excellente interprétation de Pierre-Olivier Grondin. Son Mozart est naïf, erratique, enfantin et légèrement hypocondriaque. Il est un formidable contre-poids qui magnifie la performance de Jacques Leblanc, sans rien enlever à son immense talent.
Crédit photo: Stéphane Bourgeois

Mary-Lee Picknell impressionne encore. Cette saison sa virtuosité explose dans des rôles forts diversifiés. Elle a été tour à tour, accompagnatrice d'un suicidaire, pénis (oui, vous avez bien lu!) et épouse de Mozart. À chaque fois sa présence a été remarquée. Elle est ici une superbe Constance, follement amoureuse de Mozart, à la fois femme originale et terre-à-terre.


Écrin féérique
Crédit photo: Stéphane Bourgeois
Ce Mozart revisité s'offre dans un écrin magnifique. Il est d'une sublime simplicité. Quelques pendrillons gris à gauche et à droite de la scène qui forment les mots Mozart côté jardin et Salieri côté cour. Quelques meubles et accessoires occupent l'espace scénique selon les besoins d'identification des lieux. De plateaux mobiles se greffent au spectacle afin d'amener sur scène musiciens ou accessoires plus imposants.

L'écran transparent en arrière-scène sert de paravent pour mettre bien en évidence les excellents chanteurs aux voix magnifiques. La soprano Roxanne Bédard épate particulièrement avec sa voix envoûtante. Des performances qui donnent le goût de se précipiter à l'opéra immédiatement après la représentation.

Histoire, légende, scandale et musique enrobent de merveilleuse façon le prodigieux texte de Shaffer. La musique de Mozart offre de nombreux moments magiques. Elle est en surcouche des situations et des émotions. Tout comme les airs d'opéra disséminés tout au long de la pièce.

Crédit photo: Stéphane Bourgeois
Profondément humain 
Ce n'est pas une pièce sur Mozart, encore moins sur Salieri. C'est un spectacle sur l'humain: le vilain, le traditionnel, le pieux et l'original, le bon vivant, le naïf. Il y a bien quelques petits défauts ici et là, mais si peu. Rien pour bouder notre très grand plaisir.

Allez-y surtout si vous aimez: les mélanges harmonieux de comédie légère et de drame exceptionnel, les réflexions sur l'immortalité, Jacques Leblanc, la musique de Mozart, vous offrir du bonheur au théâtre.

Au Trident jusqu'au 19 mai. Avec Bertrand Alain, Roxanne Bédard, Nancy Bernier, Israël Gamache, Marie Gignac, Pierre-Olivier Grondin, Jacques Leblanc, Véronika Makdissi-Warren, Mary-Lee Picknell, Lucien Ratio, Réjean Vallée, Rachel Baillargeon, Jonathan Bédard, Kevin Geddes, Karina Laliberté, Jean-Michel Marois, Marie-Andrée Mathieu, Anne-Marie Bernard et Alexandre Sauvaire. Un texte de Peter Shaffer. Une mise en scène d'Alexandre Fecteau.

Bon théâtre et bonne danse!

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