jeudi 3 mai 2018

Danse de particules: particules animées

Danse et théâtre entrent en résonance dans ce court moment, 50 minutes à peine, qu'est Danse de particules. Un moment artistique surprenant où la physique rencontre le monde artistique.

Une critique de Robert Boisclair

Crédit photo: David Mendoza Hélaine
Synopsis (tiré du site de JokerJoker)
Une physicienne devenue comédienne se trouve dans un train, entre le point A et le point B. Alors que sa vitesse dans le train se rapproche de l’infini, elle peut voyager librement entre deux époques de sa vie.

Le point A: la fin d’une journée de travail en laboratoire, la physicienne regarde le fond d’un bécher. Elle y voit des micro-organismes qu’elle bombarde d’un laser. À travers ces formes de vie, elle voit tous les instants de sa propre existence défiler et lui retourner le regard.

Le point B: elle sort d’une répétition de théâtre qui la bouscule jusqu’à ses plus profondes convictions sur l’art. Pourquoi participer à cette pièce vide de sens, où elle se fait durement diriger et où elle remet en question la raison même de pratiquer ce métier?

Dans ce train bondé de gens, les passagers se transforment autour d’elle et deviennent le fil conducteur entre ces deux époques de sa vie. Cette pièce est une ode à la vingtaine effrayante, à l’angoisse cosmique, au temps qui passe et au chemin que nous faisons toutes et tous, peu à peu. Qu’est-ce qui relie la personne que nous étions à celle que nous devenons?

Crédit photo: David Mendoza Hélaine
La danse s'invite au royaume des particules
Des danseurs qui deviennent particules, bactéries e.coli, protons qui s'éclatent, entropie en mutation ou poussières d'étoiles. Ici, la danse s'invite dans le mystérieux monde de la physique.

La physique qui entre en collision avec le monde artistique permet de dresser un fascinant parallèle entre l'évolution cosmique et l'épanouissement individuel. Si le comportement des électrons n'est pas prévisible de manière déterminée comment le comportement humain peut-il l'être? Il ne l'est certainement pas. Ce qui relie l'être humain que nous étions hier à celui d'aujourd'hui pourrait bien n'être qu'un fil ténu que nous ne connaissons pas encore. Il faut donc cesser de se questionner sur le passé et vivre le moment présent. C'est ce que propose Danse de particules. Faire une pause, cesser de penser à hier et vivre le moment présent.

L'importante réflexion se conclue sur une belle image: un ciel étoilé, une femme étendue qui le regarde, des particules, les danseurs, qui se posent doucement. Un temps suspendu dont on ne voudrait pas qu'il s'arrête.

Crédit photo: David Mendoza Hélaine
Danse ou théâtre?
Danse de particules s'offre dans une partition mi-théâtrale mi-dansée. La danse décline métaphoriquement et magnifiquement les épreuves subies par l'univers en expansion ainsi que les questionnements vécus par cette femme, autrefois scientifique, aujourd'hui comédienne. La portion théâtre sert de catalyseur, de point d'ancrage à cette histoire, adroitement contée par Stéphanie Jolicoeur.

Si la portion dansée s'apparente bien plus à du mouvement corporel qu'à de la danse, elle n'en est pas moins ravissante. Elle pose un regard sur les liens impalpables, ceux qui définissent nos actions comme ceux qui transforment le cosmos. Les corps, par impulsions instinctives, nous immergent dans les profondeurs de l'univers et de notre for intérieur.

Le théâtre, par la voix de Stéphanie Jolicoeur, nous questionne. Il est l'élément déclencheur, la courroie de transmission qui, combinée à la portion dansée, fournira la clé pour dénouer l'énigme. Le théâtre est l'élément palpable, tangible, rationnel. Le regard posé par le théâtre est limpide mais il a besoin de la portion dansée pour bien s'exprimer. L'un ne peut se passer de l'autre. La résultante est plus grande que la somme des parties.

Crédit photo: David Mendoza Hélaine
Allez-y surtout si vous aimez: les spectacles à la fois éducatif et artistique, les réflexions sur le sens de la vie, les formules courtes, les spectacles plus expérimentaux.

À Méduse jusqu'au 5 mai. Avec Stéphanie Jolicoeur, Alexandra St-Pierre, Elizabeth Baril Lessard, Elizabeth Crispo, Etienne Lambert, Francis Paradis et Raphaëlle Fougères. Une mise en scène d'Emile Beauchemin.

Bon théâtre et bonne danse!

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